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Mirmon eût l’idée de prendre un taxi pour retrouver sa demeure. Le long du trajet, il savait qu’à un moment ou un autre, son gardé à vue, à l’instant laissé en conditionnelle, reviendrait sur les lieux de son crime. Suffirait de l’attendre voire de lui préparer un comité d’accueil. A la sortie de Fécamp, Mirmon fit arrêter le taxi sur le parking de la grande surface en demandant au chauffeur de bien vouloir patienter dix minutes. C’était suffisant pour faire ses petites emplettes alimentaires puis il reprit la route de son domicile campagnard. Mirmon avait hâte d’y arriver, d’abord pour présenter ses hommages à sa nouvelle bouteille de whisky, l’heure de l’apéro sonnait toujours ponctuelle. Ensuite une bonne douche devrait rafraîchir ses idées afin de préparer son plan de devenir. Puisqu’il était certain que celui, à qui il avait rendu la liberté sans le savoir, reviendrait rôder dans le bocage, tout devait rester tel quel. C’est dire qu’aucun signe, amenant à croire qu’âme soit revenue vivre après le départ du trio de la veille, ne devait transparaître de l’extérieur comme de l’intérieur. Aux aguets, Mirmon comptabilisait les rares véhicules longeant les limites de sa propriété. Caché derrière la lucarne éclairant sa mezzanine, il pouvait contempler toute vie, tant en amont qu’en aval, sans être repéré. Profitant du calme de la situation, Mirmon dévorait son quignon de pain frais avec charcuterie et fromage, achetés peu avant. Déjà seize heures estompaient le soleil d’hiver et la brume recouvrait petit à petit le décor. Justement à cet instant précis, la Volkswagen blanche, lancée sur la route de Dieppe, ralentit à hauteur du lieu du précédent forfait du conducteur. Puis elle continua sa course. Trois minutes plus tard, Mirmon l’aperçue faire de même en sens retour, direction Fécamp. Pas de doute, une prochaine visite se manigançait. En moins de temps qu’il ne faut pour l’écrire, comme un guépard, Mirmon se jeta de la mezzanine. Accroupis, sans faire le moindre bruit, il s’approcha de la porte d’entrée pour éviter d’être vu de la fenêtre donnant sur le jardinet. Il se redressa dans l’encoignure, y plaqua son dos et se munit du nerf de bœuf, toujours pendu là en permanence. Les oreilles à l’affût, Mirmon retenait son souffle au maximum. Le silence de son domicile lui était si familier qu’il savait presqu’instinctivement identifier le moindre trouble. Le grand gaillard arrivait d’un pas léger pour stopper net. Observant les lieux, n’y voyant pas l’ombre d’une lueur s’échapper de la maisonnette, ne percevant aucun son domestique, il avança jusqu’au seuil. Visant la fenêtre, il lui jeta un petit caillou relevé à ses pieds. Mirmon érigea ses bras dont les embouts pressaient le nerf de bœuf comme pour l’écraser. Quelques secondes amputèrent la minute puis le visiteur caressa la clenche de la porte d’entrée jusqu’à la rendre prenable. Le grand gaillard serpenta dans l’entrebâillement puis s’écroula de tout son long en poussant le râle du taureau victime de l’estoc. Mirmon venait de mettre toute sa force pour rompre le cou de l’indésirable, désormais carpette pour marchand de sable. Traînant le colis vers le milieu de la pièce, Mirmon referma sitôt la porte puis mis en service une lampe à son chevet. Il retourna sa proie pour lui palper le costume. Un portefeuille cuir noir à deux battants s’ouvrit aux yeux de Mirmon. Le tricolore diagonal de la Maison Beauvau le cabrait au garde à vous. 

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